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Topic: bandes originales, livres/expos/tv...
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Voir et revoir Performance de Nicholas Roeg

par arbobo | imprimer | 5mai 2010

L’un des secrets les mieux gardés de la cinématographie rock ressort au cinéma. Nicholas Roeg, celui qui offrit plus tard à Bowie l’un de ses rôles les plus intrigants, avait aussi eu le plaisir de faire tourner Mick Jagger dans Performance. Alors que le film ressort sur grand écran, pourquoi vaut-il réellement la peine d’être vu?


Poor white hound dog

Casting parfait pour film collector

Performance c’est le casting de rêve de 1970, que ce soit devant ou derrière la caméra.
Réalisé à 4 mains, Performance voit Donald Cammel flanqué de Nicholas Roeg, dont c’est le premier passage derrière la caméra et qui signe aussi la photo du film.
Ce qui mérite d’être souligné car on a droit à de  beaux plans très graphiques et à des effets de photo psychédéliques (ajoutons aussi quelques dessins muraux pop… de Guy Peellaert?).

Il avait déjà bossé avec David Lean ou Truffaut (mais aussi Roger Corman, le jeune homme faisait le grand écart). Roeg est donc celui qui a fait tourner Jagger, Bowie, Donald Sutherland, sa filmographie est assez courte mais il a été une figure importante du cinéma anglais encore bouillonnant des années 70. Après une décennie classieuse, il est retombé dans l’anonymat et les téléfilms, si l’on excepte des films mineurs comme Les sorcières avec Anjelica Huston.

Pour Jagger, c’est le premier rôle au cinéma, quelques mois avant Ned Kelly, western d’une autre figure du cinéma britannique Tony Richardson. La même année il aura eu ses deux rôles les plus marquants d’une carrière d’acteur qui reste maigre (10 apparitions en tout et pour tout).
Il est bien accompagné, par la très française et très androgyne Michèle Breton, et sa très compagne et très sex-symbol Anita Pallenberg. Autant dire que le photographe de plateau n’a pas du s’ennuyer.

Enfin, la musique est signée par un américain habitué des BO, Jack Nitzsche. Un choix excellent à l’évidence, puisqu’il est tout aussi fan de blues que Jagger.

Alors cette bande originale?

Originale, elle ne l’est pas intégralement car on a une belle scène de tension sur fond du Wake up niggers des Last poets. Pour le reste, Nitzsche remplit le contrat en nous régalant de titres “à la Rolling stones”, et en invitant rien moins que Buffy Sainte-Marie ou Ry Cooder. On a même un passage onirique (une hallucination aux champignons) qui autorise Jagger à chanter pour de bon, alors que le film n’est pas une comédie musicale.

Nietzsche était le choix idoine, ce bluesman imprégné de rock, ou l’inverse, est un peu le pendant américain des Stones. Mais il est aussi un habitué des musiques de films, un spécialiste du genre de l’Exorciste à the hot spot de Dennis Hopper.
Du coup, Nitzsche sort régulièrement du blues pour des passages adaptés à l’ambiance d’une scène, notamment le bruitiste morceau Performance qui fait grand usage du Moog.  Comme d’habitude, des morceaux non retenus pour le film sont bel et bien sur la BO, comme le champêtre Rolls Royce and acid.

Mention spéciale au blues Powis square, et à Dyed, dead, red, bien barré du côté de l’Asie mais avec des choeurs occidentaux, qui vire angoissant à mi-course. Memo from Turner ressemble à s’y méprendre à une compo Richards et Jagger (qui est au chant), et Poor white hound dog avec ses sons d’oscillateur est aussi une vraie réussite dans le mélange de genres, à l’image du film. Sans lister tous les titres, on ne peut que vous recommander de vous procurer la BO et pas seulement le film. Pour doubler le plaisir.

Un polar psychédélique

Vous vous souvenez? C’est un film de 1970, alors les champis, les effets stroboscopiques, en veux-tu en voilà.
C’est un film avec Jagger et Pallenberg, alors la blanche, la poussière d’ange, le dreu-dreu, c’est un peu l’actrice principale ^^

Malgré tout il y a un scénario, qui imbrique deux films en un. Chas est un homme de main de la pègre, on le voit au début dans ses basses oeuvres, mais son zèle finit par le griller auprès de son boss. Il part se mettre au vert, jusqu’à ce que son boss le retrouve en fin de film.
Le personnage principal est donc un mec psychorigide, pas très intelligent, qui n’aime que deux choses, tabasser et mettre ses chemises en ordre dans leur tiroir. On suit sa descente aux enfers et sa fuite in extremis, menées tambour battant.

Moyennant quoi, et c’est la plus grosse surprise du spectateur, on ne voit pas la bouille de Jagger avant la 32′ minute (si on excepte un léger flash à la 25′). Lorsque Chas arrive dans cet immeuble un peu pourrave de Notting hill, un autre film débute.
Avec le peu de psychologie qui le caractérise, Chas se fait passer pour un artiste de cirque pour être mieux accepté dans la maison et ne pas attirer les soupçons. Vivent là, avec des relations assez imprécises, Turner, musicien de génie reclus et en panne d’inspiration, sa compagne Pherber (Pallenberg), leur amante partagée Lucy (androgyne au possible, thème transversal du film), et une gamine qui navigue dans la maison avec un air entendu, jamais étonnée de rien.

Durant une heure environ, on assiste à un jeu de chat et de la souris entre Chas et Turner. Les films de manipulation ont donné quelques joyaux du cinéma anglais, et on pourrait y ajouter celui-ci. Encore que Turner et Pallenberg font plus tourner leur locataire en bourrique qu’autre chose. Avec eux les règles du jeu changent sans cesse, et Chas finit par perdre tout repère (notamment ceux de son identité sexuelle), devenant le jouet de ses hôtes déglingués.
Cet heure passe comme un instantané d’un long trip, ce qui n’était sans doute pas loin de la vérité, y compris dans le baroque de certaines scènes. Deux folies s’affrontent, deux manières de franchir les limites, celles de la loi pour Chas, celles de la normalité et de la réalité pour Turner

Est-ce à cause de la présence délirante de Jagger et Pallenberg, qui crèvent l’écran? On préfère la partie psychédélique du film, en tout cas. Ne serait-ce que parce que cette époque est la seule à avoir donné de tels films qui ne soient pas de purs exercices de style mais le produit de leur époque (comme Zabriskie point, sorti la même année).
Un film comme Performance a gardé une liberté formelle apportée par la nouvelle vague, mais y a ajouté des ingrédients de la beat generation, eux-même inspirés de dada et des surréalistes.

Vous suivez? Performance passe même pour être le premier film utilisant le cut-up, une technique de découpage-remontage aléatoire chère à William Burroughs. A leur manière, Cammel et Roeg se paient la tête de l’Angleterre traditionnelle, le genre du polar populaire étant tourné en ridicule à travers ce Chas déboussolé, qui fait perdre par la même occasion tout ressort de suspense et d’action au polar qui avait ouvert le film. Comme si la “vraie vie” n’avait pas plus de sens qu’un trip, le plaisir et la liberté en moins. L’ironie suprême étant de faire incarner la société bourgeoise et son carcan de conventions par un voyou pas très futé.



Comments

2 Commentaires


  1. 1 Ska on mai 5, 2010 10:16

    Vu il y a longtemps… Et ce film est loin de m’avoir marqué, je l’avoue… De Roeg, je préfère nettement Ne vous retournez pas, avec l’immense Donald Sutherland…

  2. 2 arbobo on mai 5, 2010 11:20

    à voir en effet. Honte sur moi, j’avais oublié qui, était sa partenaire, c’est pourtant julie christie, mais Sutherland y est partout.

    pour Performance, il faut aimer les films psyché, ou avoir envie de découvrir Jagger l’acteur. Pas un chef d’oeuvre mais un film très sympa et malin :-)

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