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Topic: numériques
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Le gratuit, c’est pas cher (ou : faut-il s’abonner à la neufbox?)

par arbobo | imprimer | 3sept 2007

Gratuit ! Qui dit mieux?

Je commente rarement l’actualité de l’industrie musicale, mais il est bon de s’y arrêter de temps à autre. Cet été 2 annonces ont fait du bruit, mais toutes deux méritent d’être détaillées et précisées. Mais ces offres, surtout, alimentent des questions véritables sur l’avenir des supports musicaux à court et moyen terme, alors que le 25e anniversaire du CD a été fêté très discrètement.

Universal, leader mondial des ventes grâce à son catalogue gigantesque, cherche la bonne formule. Les majors se sont beaucoup plaintes du téléchargement pirate, ce qui est logique, mais on leur a aussi reproché en retour une kyrielle de défauts. Maigreur des catalogues numériques, encodages trop faibles (128 kbp pour itunes, de 192 à 256 à la Fnac), DRM (protections numériques) qui empêchent de lire correctement les morceaux et qui nous fliquent, formats propriétaires (certains fichiers ne peuvent être lus que sur ipod, et inversement)… sans compter le prix faramineux des nouveautés en CD.

Les majors ont fait des progrès sur certains points, à commencer par le prix des CD, beaucoup de nouveautés sont entre 13 et 15€, ce qui est correct, en tout cas mieux que vers l’année 2000 où les prix dépassaient allègrement les 20 euros !

Pour ce qui est de l’offre numérique, les progrès ont tardé, et restent sujets à débat.
Récemment, EMI a frappé un grand coup publicitaire en annonçant des morceaux sans DRM, c’est à dire lisibles sur tout appareil et gravable en nombre illimité. En plus, ces morceaux sont enfin encodés à un taux correct (256 kbp), ce qui est encore très en-deçà de la qualité CD, mais assez bien pour la plupart de nos oreilles.
Mais, car il y a un gros “mais”, cette offre est exclusivement réservée à itunes, et pour ces fameux fichier il faut débourser non plus 99 centimes par morceau mais près d’1 euro 30. Le coup de pub n’est pas passé inaperçu, mais le prix est dissuasif. Merci EMI, merci Apple, d’avoir tendu ce piège à cons, cage à pigeons grande ouverte.

Universal a attendu. Fort de sa position de leader grâce à un catalogue monumental, ils n’étaient pas pressés. Cet été, coup sur coup ils annoncent 2 mesures concurrentes.
D’abord, pendant 6 mois, c’est à dire jusqu’à janvier 2008 compris, Universal teste la vente en ligne sans DRM, afin de voir si les pirates reviennent dans le giron de l’économie officielle, ou si les ventes vont stagner.
Je m’interroge. Evidemment, 6 mois est un délai raisonnable, on voit mal tester un impact sur les ventes en seulement 1 mois. Mais les flux numériques obéissent à un principe cumulatif. Internet c’est ”toujours plus”. On voit mal comment Universal pourrait revenir en arrière en janvier prochain.
Dans le pire des cas, les ventes auront stagné, les DRM seront restaurées, et la grogne des utilisateurs sera immédiate. Dans les 24 heures, des sites et des communiqués conspueront Universal, dont la cote de popularité n’est déjà pas très haute (souvenez-vous de Noir Désir s’adressant à Messier lors des Victoires de la musique, image qui a fait le tour du monde). Je vois que Philippe Astor tire des conclusions similaires.

Parallèlement, Universal a lancé une nouvelle offre exclusive, bien plus maline. Depuis quelques jours Neuf télécom fait sa publicité sur son offre internet/télé/téléphone “avec téléchargement illimité”. Le tout pour le même prix que la concurrence, 30€/mois.
Moi qui suis abonné chez un concurrent, dois-je me laisser tenter?

Oui et non. D’abord cette offre n’est pas “illimitée” mais réservée à 1 catégorie (parmi 9) du catalogue. En gros, les fans de nouveautés, ceux qui aiment les tubes qui passent en radio, trouveront ce qui les intéresse. Pour les autres, ça va dépendre, car tous les titres ne sont pas numérisés, loin de là. Et de toute façon l’offre ne s’applique pas aux artistes qui sont chez Warner, EMI, Virgin, etc.
Pour avoir accès à la totalité des catégories, il faudra débourser 5 euros de plus chaque mois. Si l’on se souvient que l’achat titre par titre est en moyenne de 1€, l’offre reste apparemment très alléchante.

Mais il y a une subtilité. Comme je le lisais à l’annonce de cette offre, il ne s’agit pas d’une véritablement vente, mais plutôt d’une location des titres musicaux.
Si vous achetez titre par titre, vous avez le morceau une fois pour toute, et si vous l’avez gravé vous ne craignez même pas de le perdre à cause d’un virus. Avec l’offre Neuf, vous pouvez écouter les titres… jusqu’au mois suivant.
Pour le coup, on est dans le règne des DRM. Vu le prix incroyable de l’offre, c’est parfaitement logique. Une protection, intégrée dans le fichier, bloque la lecture si vous ne vous connectez pas chaque mois avec un abonnement à jour. Le tout avec obligation d’utiliser le lecteur windows media ! Quoique je doute que cette dernièr restriction résiste à un passage devant le Conseil de la concurrence.

Autrement dit, vous ne pouvez pas graver les morceaux, mais seulement les transférer sur un lecteur mp3. De même, si pour une raison quelconque vous changez d’opérateur, vos fichiers sont perdus, vos compils préférées ne peuvent plus être écoutées. Si vous  emménagez chez quelqu’un qui a un autre fournisseur, adieu vos mp3. Si vous déménagez à l’étranger ou dans une zone non couverte (habitez en province loin de la ville, et demandez-vous si vous avez vraiment le choix de votre fournisseur), et c’est bye bye Céline Dion.

Voilà une première raison de réfléchir avant de changer de fournisseur : est-ce que ces contraintes sont compatibles avec vos projets d’avenir et avec votre manière d’écouter la musique?
L’autre raison, je l’ai déjà citée. Internet = toujours plus. Et lorsqu’une offre alléchante arrive sur le marché, la concurrence fait le maximum pour proposer un équivalent.
Si Universal a bien fait son boulot de leader, ils n’ont accordé l’exclusivité à Neuf télécom que pour une durée limitée, et avec des clauses de sortie de l’accord. Neuf est encore “petit”, leur offre est destinée à leur faire gagner des parts de marché.
Pour l’instant, chacun a sa spécificité : la Freebox fait magnétoscope numérique (des dizaines d’heures stockables), Club-internet a son direct-différé (on peut appuyer sur pause pendant le direct, et reprendre après la coup de fil de maman), et Neuf son téléchargement “illimité” (sic).

Mais bientôt toutes ces caractéristiques seront accessibles à tout le monde. Les deux premières ne dépendent que de la technique, mais pour la musique, les négociations avec les éditeurs sont plus ardues. D’autant que ces derniers doivent eux-mêmes négocier avec les artistes et les organismes de gestion des droits (Spedidam, Sacem, SACD). D’ailleurs je n’ai pas encore terminé cet article que France Télécom annonce sa contre-attaque. Quant-à Universal, passé le bénéfice de son effet d’annonce, je doute qu’un groupe si énorme se contente bien longtemps d’un partenariat exclusif, Neuftel ne représentait que 10% des abonnés début 2007.

Universal illustre le dilemme actuel des professionnels envers les DRM. Soit des DRM béton, mais avec des avantages, soit plus de DRM du tout. L’accès “illimité” au catalogue est alléchant, mais n’oublions pas que les autorités se sont déjà prononcées contre les DRM traditionnelles, et que les autorités de la concurrence ont demandé l’abolition des formats propriétaires (par exemple Sony vient de renoncer à son format Atrac pour sa nouvelle gamme). Le bras de fer est engagé entre les professionels et les utilisateurs, pour savoir quel standard s’imposera, libre ou surveillé.

Je reviendrai très bientôt sur les formats numériques en tant que tels. Pour l’instant, à celles et ceux qui sont tentés par l’offre de 9, je conseille d’attendre. En dehors même de mon aversion pour les DRM. D’abord, parce que les 6 prochains mois verront des offres concurrentes apparaître, et que dans l’intervalle vous aurez pu entendre les abonnés dire s’ils sont contents ou non de ce système (j’en doute). Faites un test tout bête. Prenez vos disques préférés, ou les artistes préférés que vous seriez susceptibles de télécharger. Vérifiez d’abord combien d’entre eux ne sont pas chez Universal, et pour ceux qui le sont, regardez donc combien appartiennent à 1 seule des catégories du catalogue. Ca devrait couper l’envie à plus d’un.

(les autres articles de la série musique et internet, là)



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