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C… comme “collector”

par arbobo | imprimer | 25sept 2010

Voilà bien un mot qui mérite peu d’explication :o)

Avec tout de même une nuance, voire deux. Ce qui fait qu’un objet est collector est sa rareté, rareté toute relative, relative à la notoriété. Quand on est AC/DC ou 50 cent, faire une série limitée de 20′000 exemplaires relève pour ainsi dire du collector, car des millions de fans en seront privés.

Mais pour la plupart des artistes, y compris ceux qui vivent peu ou prou de leur musique, 20′000 ventes d’album est déjà un très bel objectif loin d’être facilement atteint. Je vous parle d’artistes connus et qui passent en radio, pas Julien Clerc mais tout de même, je ne crois pas que Keren Ann ait souvent dépassé les 50′000 ventes (une fois, pas plus). Or beaucoup d’artistes sont nettement moins connus et vendent logiquement moins.

Quand on débute, parfois on se fait d’abord presser des CDs au studio où on a enregistré. Ca reste de l’autoproduction, mais c’est un peu plus “pro” que les CD-R, ces CD vierges gravés par l’artiste lui-même sur son ordinateur et vendu à la sortie des concerts. Là, on est vraiment dans l’underground, et comme l’artiste passe à autre chose au bout de quelques mois, vous pouvez toujours vous gratter pour récupérer les tout premiers CDR. Du collector tu veux? Du collector en voilà.
Un type comme André Herman Düne, échappé du groupe du même nom pour cause de succès trop envahissant, fonctionne principalement ainsi. Si vous allez rue Sainte-Marthe à l’excellent disquaire Ground zero, vous trouverez un bac entier de ses CDR fabriqués par ses soins, dans son cas c’est un choix, pas une contrainte subie.

Les collectors sont généralement des “introuvables”. Je ne parle pas des séries courtes, la house et l’électro fonctionnent encore avec des tirages de vinyls oscillant entre 500 et 1000 exemplaires. Une nouveauté chasse l’autre, l’idée même de réédition est saugrenue. C’est le fonctonnement de ces courants musicaux et de leurs DJ qui veut ça, en gros les tirages correspondent à la demande on n’est donc pas dans du collector, mais dans un marché de “niche”.
Comme en numismatique, le comble du collector est la pochette ou le disque comportant une erreur, parfois certaines séries n’ont jamais été commercialisées avant de ressortir au compote-goutte dans les conventions ou chez les spécialistes.

L’introuvable, c’est aussi le petit artiste qui n’a quasiment rien vendu et qu’un DJ retrouve des années plus tard. DJ Pal, un parisien, s’est spécialisé dans le rare funk. Il ne joue que des 45t originaux des années 60-70, dont personne n’a entendu parler et qui valent le coup.

Mais il y a des dévoiements. La série limitée conçue exprès comme outil marketting pour faire parler de soi et vendre encore plus de la version “normale” de son disque, a quelque chose qui me déplait. La musique a ce don, avec la littérature ou le cinéma, de pouvoir être un art pour tous, là où les arts plastiques voire le théâtre, la danse, sont d’un accès plus restreint (pour voir les originaux, du moins). Cette manière de certains mastodontes de jouer au petit artiste indépendant a quelque chose d’indécent.
Créer délibérément de la frustration dans le seul but de vendre plus n’est pas ma conception de l’art. Même si je sais que certains coffrets bourrés de bonus sont trop chers à fabriquer pour qu’on puisse prendre le risque de nombreux invendus. Mais quelques fous mettent le paquet à des prix abordables, comme un certain coffret des Flaming lips contenant un sachet de pop corn, un t-shirt, un ticket de film spatial… Et puis il y a les pochettes de Warhol, le premier tirage du Velvet underground où la banane se décolle, celui de Sticky fingers des Stones où la fermeture éclair découvre le pubis de Mick Jagger. Des légendes. Légendes savamment orchestrées par un génie du marketing.
Par comparaison les Flaming lips, dont le public de fans ne se compte pas en millions, est plus proche de ce fou d’alice Cooper et ses pochettes bourrées de bonus, notamment celle chère à Guic’, avec le faux billet d’un million de dollars :-) Là on est dans le cadeau aux fans, on entretient une relation, et même “l’album blanc” des Beatles avec ses photos grand format va dans ce sens. Faire un bel écrin. Quoiqu’à ce jeu les vainqueurs sont les mini séries fabriquées, dessinées, et assemblées à la main comme on en trouve chez Camaraderie limited, avec le premier album de Hitchcok go home enrobé de tissus, avec la sérigraphie qui accompagne le vinyl du dernier Damien Jurado (voir photo).

Je comprends que la montée du téléchargement et des solutions gratuites comme Deezer ou Jiwa puissent hérisser les artistes et les producteurs, provoquant tantôt colère tantôt crainte du chômage ou incrédulité devant l’idée que l’art puisse ou doive être gratuit. Je ne reviens pas sur ces questions que j’ai abordées en longueur.

En revanche un article paru dans Libé m’a mis les nerfs. Voilà un label, Onement qui s’est mis en tête de fabriquer des exemplaires uniques, d’ailleurs même l’artiste n’en a pas. Cet exemplaire unique est vendu à prix d’or, bien évidemment, plusieurs milliers d’euros. J’ai été soufflé par cette nouvelle, et la colère a bien failli l’emporter. Le côté objet unique est très très séduisant, je suis d’accord. Ca devient une performance, un acte artistique plus que de la musique.
Mais je préfère la performance éphémère, dans ce cas, le concert que l’artiste refuse aussi bien d’enregistrer que de reproduire de quelque manière que ce soit. Il y a là un geste artistique fort et généreux.
Mais ce n’est pas la démarche de Onement. Acheter un disque 2000 ou 3000 euros, c’est en faire un objet de luxe inaccessible sauf aux riches. Premier objet de mon courroux.

L’artiste est dépossédé de son enregistrement, non pas parce qu’il a préféré tout vendre mais parce que le label l’a prévu ainsi, c’est l’unicité de l’exemplaire qui permet de le vendre à ce prix indécent. D’autant plus indécent que si le prix de l’objet est ridiculement élevé, le cachet de l’artiste reste modeste. si on va dans le luxe, alors au moins qu’on pousse la logique de l’argent jusqu’au bout, on crée une résidence et l’artiste est bien payé.
Je ne dis pas que ce système me plairait forcément, mais il serait cohérent. Mais qui s’étonnera que ceux qui achètent du luxe ne se donnent pas la peine de payer les artistes à leur prix?

Heureusement, des petits tirages de qualité on en voit régulièrement. Comme le fait le bel Atelier ciseaux. Des artistes économiquement fragiles améliorent leur ordinaire et le nôtre en ayant des vinyls vendus exclusivement sur la tournée. Dans l’enthousiasme d’un concert magnifique on repart avec un 45t ou un EP de Joan as Police Woman ou de Stereolab sous le bras. La rareté dans ce cas ne fait que découler d’une demande limitée. Ce qui est le cas également d’artistes débutants encore peu connus. Il est grand temps de vous dépêcher si vous voulez vous procurer un des derniers exemplaires du 45t de Marie-Flore chez Victrola, ou celui de feu les Koko von Napoo.
Aujourd’hui ce sont des séries limitées. Mais lorsque ce seront des stars mondiales, on les considèrera comme des collectors ;-)
Et vous aurez récompensé une vraie démarche artistique ne connaisant ni le luxe ni les faux-semblants.



Comments

17 Commentaires


  1. 1 mus on septembre 26, 2010 10:19

    ça parle de plus en plus des Flaming lips par ici ^^

  2. 2 arbobo on septembre 26, 2010 13:35

    ouais, t’as mis un virus, mus, c’est insupportable :o)

  3. 3 Christophe on septembre 26, 2010 23:10

    Un collector, genre le premier “album” des beastie, un 8 titres sur un 45t petit format ?

    Ca doit être super d’avoir un collector comme ça.

    Si si.

    Je le sais, je l’ai, alors hein.

    Et pas cher que je l’ai acheté : 30 F !

  4. 4 arbobo on septembre 26, 2010 23:59

    tu sais combien ils en ont fait? Pas de réeds, je suppose, les connaissant.

  5. 5 Christophe on septembre 27, 2010 6:14

    environ 800 au monde dont 400 chez Motrio en France et autant aux US

  6. 6 arbobo on septembre 27, 2010 8:48

    je t’envoie ton brevet de geek en colissimo alors :-)

  7. 7 mus on septembre 27, 2010 21:43

    je l’ai au moins touché ^^

  8. 8 Magda on septembre 29, 2010 15:35

    Excellent article Arbobo!

    J’en apprends de belles… de toute facon, ce trip “collector”, ca agace… tout est collector, on se demande si on vend encore de la musique ou (pardon pour ce groupe que tu as l’air d’aimer) du pop-corn…

    et on atteint le pompon de la pomponnette avec ces disques uniques à 2000 euros. Cela dit, à mon avis c’est plus l’artiste qui en pâtit que le public. Comment établir sa notoriété avec un album unique? C’est merdique.

  9. 9 arbobo on septembre 29, 2010 18:40

    merci :-)

    oui ça m’a assez énervé ce truc de pressage unique, je bouillais devant mon écran

  10. 10 mus on septembre 29, 2010 22:28

    Le pop-corn, faut prendre ça plus comme une blague Magda ;) regarde le prix du “collector” sur le site des Flaming Lips, je suis sûr qu’ils perdent de l’argent avec ça ^^

  11. 11 arbobo on septembre 30, 2010 16:05

    le pop corn va effectivement avec le film associé au disque, si on n’explique pas ça reste obscur ^^

  12. 12 Dom on octobre 2, 2010 22:41

    Pas souvent qu’on aborde le sujet, merci donc.

    J’ai bien envie de lancer un “débat” mais ça pue déjà le sapin d’ici…peu importe c’est beau un sapin (surtout dans les forêts noires).

    En fait j’ai un soucis avec l’association du terme “collector” ET du support CD. Soit il y a eu de très beaux objets comme le Amnesiac de Radiohead (je prend un groupe “standard” histoire de pas partir trop loin) en version “petit livre cartonné de poésie” par exemple. Etc…

    Mais pour une certaine génération (oui je sais ça sent le cliché et les généralités depuis l’autre bout du couloir) c’est le 33 & 45 tours qui étaient associés au terme sus mentionné. En fait (et là est le “vrai” sujet) quand j’ai acheté mon premier collector sur support CD j’ai pensé “merde c’est tout petit !!”. Il est peut être là le problème, on nous a tout rapetissé, miniaturisé. Du coup on a tout de faussé, tu vois où je veux en venir ? Non parce que bon un 33 T d’époque de Ike & Tina à l’Olympia (1971 si ma mémoire est bonne) c’est tout de même une autre catégorie. Après ne faudrait-il pas différencier le “collector vintage” du collector “d’aujourd’hui” ?….Hum…

    Encore un débat à la con tiens

    N’empêche que le son c’est pas le même bordel (en plus de la taille)…oui bon ok on pourrait refaire le monde et ses couleurs pendant 400 ans avec de tels propos.

    A vrai dire le collector c’est un peu nous qui en faisons ce qu’il est (au putain le vieux débat qui surgit à peine l’autre entamé)…

    Ceci étant dit (et pour finir) ça m’amuse toujours autant de constater qu’il y a autant de personnes qui se plantent quand on leur pose la fameuse question: “Et sur un 33 T il y a combien de sillons ?”

    Salutations cloutées,

    Dom

  13. 13 arbobo on octobre 2, 2010 22:58

    ah ah j’adore ta question, mais ça risque de me faire sentir très vieux en entendant la réponse ^^_

    c’est vrai que quand on dit “c’est collector”, généralement c’est avec une pointe d’envie et donc qu’on trouve que c’est cool, là c’est clair que le vinyl est plus cool que le cd.

    cela dit, quand tu achètes un album chez camaraderie ltd, ou à une époque chez kutu folk, on a un objet fait main, une pièce unique, ce qui compense largement et reste tout aussi collector qu’une édition de vinyl à 500 ex.
    sait-on jamais :-)

  14. 14 Dom on octobre 3, 2010 4:33

    Hum…j’ai encore mes adresses sur Paris…et je reste persuadé que ça me fait plus d’effet(s) d’acheter un collector vinyl qu’un collector CD : )

    Si t’es vieux je suis déjà dans une boîte en chêne (liège, c’est plus facile à transporter) !!

  15. 15 arbobo on octobre 3, 2010 13:34

    je suis trop boulimique pour acheter beaucoup de collector ^^
    sauf quelques petites obsessions et encore…

  16. 16 alex twist on octobre 3, 2010 16:20

    idée de sujet intéressante

    pour les collectors, en matière de “vieux disques” (60s, 70s) il y a beaucoup de choses obscures qui valent pas mal de tunes
    précisément parce que la musique est excellente et que les groupes ont très peu vendus à l’époque
    c’est du collector involontaire

    l’idée de “série limitée” n’est pas une invention de la musique, je dirai que c’est le propre de tout objet facilement reproductible
    à commencer, par les photos dans l’art, (c’est dans la même logique de faire une série limitée d’un tirage photo, que d’une eau-forte, d’une sérigraphie que d’un disque vinyle)

    c’est vrai que faire une série limitée ça peut avoir un coté artificiel, et qd je vois des tirages de 45 tours (par exemple Interpol) limités à 10 000 exemplaires, je trouve ça assez ironique de pousser le vice jusqu’à dire qu’il s’agit d’une série limitée et numérotés les disques

    en revanche sur un pressage à 300-500-1000 exemplaires, je trouve ça pas illogique, après tout, même si le disque n’était pas limité, on en presserait pas beaucoup plus que ce montant là donc pourquoi pas en tirer profit
    d’autant plus que les petits tirages vinyles ont souvent un coté bricolo et amateur charmant

    par exemple pas mal d’artistes font des pochettes sérigraphiées (last rapes of mr teach, dd/mm/yyyy, vermillon sands, strange hands, real numbers, pour prendre qq exemples qui me viennent en tête) ou alors mal imprimés (c’est pas intéressant d’imprimer des pochettes en dessous d’une certaine quantité, je pense 500)

    dans tous les cas ça contribue au charme du support, et au coté “fragile”
    et dans tous les cas ça contribue à revaloriser un support qui a été bien attaqué par le mp3
    (mais le mp3 ne remplacera jamais le rapport “charnel” que l’on a avec un disque)

    bon voilà c’est un peu en vrac mes réflexions, mais bon :)

  17. 17 arbobo on octobre 3, 2010 16:24

    ah ça, le mp3, c’est vraiment l’arnaque du siècle on est d’accord, twist.

    mais les sérigraphies, ça c’est cool, je suis d’accord, et je suis sincèrement ravi d’avoir celle de sarah jurado reproduite dans l’article :-)

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